Webinaire | Séance spéciale du séminaire de laboratoire "Travailler à partir de témoignages lorsque l’accès au terrain est impossible : le cas ouïghour"

Bien que l’accès au terrain ouïghour ne soit pas officiellement interdit aux chercheurs, il reste fortement limité, voire impossible, pour les spécialistes de la région. D’une part ces derniers mettent en danger, par leur simple présence, leurs informateurs ou collègues vivant sur place ; d’autre part, ceux-ci sont devenus inaccessibles, soit parce qu’ils ne souhaitent pas prendre de risque, soit parce qu’ils ont été assignés à résidence, arrêtés ou détenus dans des camps, quand ils n’ont pas tout simplement disparu. Dans certains cas, les chercheurs se mettent eux-mêmes en danger en se rendant dans la région placée sous haute surveillance policière.
Dans ce contexte, documenter la situation ouïghoure est devenu, depuis 2017, un exercice difficile, et le plus souvent à distance. Parmi les formes de documentation potentielles, on trouve le témoignage, à la fois d’ancien. ne.s détenu.e.s et de proches de détenu.e.s. Ces témoignages directs ou indirects se sont multipliés au cours des deux dernières années. En effet, le témoignage assure des fonctions essentielles lorsque rien d’autre ne peut s’y substituer (lorsque les autres formes de preuves sont effacées ou rendues inaccessibles).

Comment faire du témoignage un instrument d’investigation ? Quelles formes peut-il prendre ? Comment estimer sa fiabilité ? Comment constituer, pour le chercheur, un travail d’équilibre entre une implication éthique forte et un détachement scientifique ? Comment comprendre l’absence de témoignage, le silence, et qu’en faire ?